Droits et obligations d’un usufruitier et d’un nu-propriétaire pour la vente d’un bien immobilier
En Belgique, la pleine propriété d’un bien immobilier peut être divisée en deux parties : l’usufruit et la nue-propriété. Cette situation juridique, appelée démembrement de propriété, est fréquente dans les contextes de succession, de planification patrimoniale, ou lors de donations. Mais que se passe-t-il lorsque l’on souhaite vendre un bien démembré ? Quels sont les droits et les obligations de l’usufruitier et du nu-propriétaire dans ce cadre ?
Cet article vous aide à y voir plus clair si vous êtes propriétaire, ou concerné de près ou de loin par une situation d’usufruit.
Définition : Usufruitier et nu-propriétaire, qui fait quoi ?
Avant toute chose, rappelons ce que signifient ces deux statuts.
- L'usufruitier a le droit d’utiliser le bien immobilier (y habiter, le louer, percevoir les loyers) sans en être le propriétaire au sens plein du terme. C’est un droit temporaire, qui prend fin au décès de l’usufruitier ou à la date prévue dans l’acte.
- Le nu-propriétaire, lui, détient le bien, mais ne peut ni l'occuper ni en percevoir les revenus tant que l’usufruit est en cours. Il est le propriétaire "en devenir", et récupérera la pleine propriété automatiquement à l’extinction de l’usufruit.
La vente d’un bien en démembrement : une opération conjointe
Un point essentiel à retenir : l’usufruitier et le nu-propriétaire ne peuvent pas vendre seuls le bien immobilier. Une vente ne peut avoir lieu qu’avec l’accord des deux parties, car chacune détient une part des droits de propriété.
En clair :
- Le nu-propriétaire ne peut pas vendre le bien sans l’accord de l’usufruitier, car celui-ci perdrait l’usage du bien.
- L’usufruitier ne peut pas vendre l’usufruit sans l’accord du nu-propriétaire, sauf cas très spécifiques, car cela impacterait la valeur du bien.
Répartition du prix de vente : qui touche quoi ?
C’est l’une des questions les plus sensibles lors de la vente d’un bien démembré. La répartition du prix entre l’usufruitier et le nu-propriétaire ne se fait pas en parts égales, mais en fonction d’une clé de répartition qui dépend principalement de l’âge de l’usufruitier.
En Belgique, un Arrêté Ministériel établit chaque année au 1er juillet les tables de conversion de l’usufruit. Ces tables expriment la valeur de l'usufruit en un pourcentage qui tient compte des tables de mortalité prospectives du Bureau fédéral du plan mais également du taux d'intérêt obligataire. Et c’est ce dernier paramètre qui peut faire fortement varier la répartition d’une année à l’autre comme ce fût le cas entre 2023 et 2024, faisant grimper la valeur de l'usufruit.
- Plus l’usufruitier est jeune, plus la valeur de son usufruit est élevée.
- Les femmes ayant une espérance de vie supérieure, la valeur de leur usufruit est plus élevée.
- Plus les taux d’intérêt sont hauts, plus la valeur usufruit l’est également.
Exemple :
Si un bien est vendu aujourd’hui à 500.000€, sur base des Tables en vigueur en 2024 la valeur de l’usufruit d’un homme de 75 ans représentera 22,17% du prix de vente (donc 110.850€) alors que s’il s’agissait d’une femme, ce montant serait de 130.050€ (26,01%), soit près de 20.000€ de plus!
Obligations respectives lors de la vente
Obligations de l'usufruitier :
- Donner son accord explicite à la vente.
- Signer l’acte de vente conjointement avec le nu-propriétaire.
- Renoncer à ses droits d’usage une fois la vente effectuée.
Obligations du nu-propriétaire :
- Participer à la procédure de vente.
- Fournir les documents de propriété nécessaires.
- Assurer, si besoin, une négociation équitable sur le partage du prix.
Peut-on vendre uniquement l’usufruit ou la nue-propriété ?
Oui, techniquement, l’usufruitier peut vendre uniquement l’usufruit, et le nu-propriétaire uniquement la nue-propriété, mais cela reste rare et délicat dans la pratique.
Pourquoi ? Parce que cela complique énormément l’acquisition pour l’acheteur, qui se retrouverait soit avec un bien qu’il ne peut pas utiliser, soit avec l’usufruit sans le support de la nue-propriété. Peu d’investisseurs acceptent ce genre de montage sans garanties fortes.
Que se passe-t-il après la vente ?
Une fois le bien vendu avec l’accord des deux parties :
- L'usufruit s'éteint définitivement, sauf si la répartition du prix prévoit une compensation pour l’usufruitier sous forme d’une rente viagère, par exemple.
- Le produit de la vente est réparti entre l’usufruitier et le nu-propriétaire selon la clé déterminée.
- L'acheteur devient plein propriétaire du bien, libre d’en faire usage ou de le louer.
Conseils pratiques pour les propriétaires concernés
Si vous êtes usufruitier ou nu-propriétaire et envisagez une vente, voici quelques conseils :
- Anticipez la discussion : plus tôt les parties discutent des intentions, plus fluide sera le processus.
- Faites-vous accompagner par un notaire ou un professionnel de l’immobilier. Il pourra vous guider dans l’évaluation de la répartition et dans la rédaction des actes.
- Soyez attentif aux conséquences fiscales, notamment en matière de droits d’enregistrement, de plus-value, ou de succession. Le contexte belge peut impliquer des subtilités régionales.
En résumé
La vente d’un bien immobilier démembré en usufruit et nue-propriété est parfaitement possible, mais elle nécessite la collaboration et l’accord des deux parties. Chaque partie a des droits, mais aussi des devoirs, notamment en matière de signature et de répartition financière. Une bonne entente et l’accompagnement par des professionnels permettent de garantir une transaction sereine, équilibrée et conforme à la législation belge.
Vous êtes concerné par un cas d’usufruit ou de nue-propriété ? Vous avez un bien que vous souhaitez vendre malgré une structure complexe ? Notre réseau immobilier est là pour vous accompagner. Nos experts connaissent les spécificités du marché belge et peuvent vous proposer un accompagnement personnalisé, juridiquement sécurisé et fiscalement optimisé.

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